Assouplissement du recrutement de personnel soignant qualifié par certains EHPAD ?
Les difficultés rencontrées par certains établissements hébergeant des personnes âgées dépendantes (EHPAD), et dont le recrutement de personnel soignant qualifié, infirmier et aide-soignant relève de la fonction publique territoriale, ont conduit la ministre des solidarités et de la santé à prendre position sur ce sujet.
Des modes de recrutement différents selon les établissements
On sait que, globalement, les EHPAD sont de plus en plus sollicités en raison de l'évolution démographique. L'INSEE estime que d'ici 2050, la population des personnes de plus de 60 ans pourrait atteindre 22,3 millions de personnes, soit un tiers de la population.
Simultanément, les budgets de fonctionnement de ces établissements restent limités et une difficulté existe pour le recrutement de personnels qualifiés afin de prendre en charge les résidents : la condition nécessaire pour entrer dans la fonction publique territoriale est la réussite à un concours.
Si des passerelles existent entre les différentes fonctions publiques, ce mode de recrutement n'est cependant pas reconnu dans l'ensemble des établissements dont les statuts diffèrent (privé, associatif ou fonction publique hospitalière). Par le décret n° 2007-1188 du 3 août 2007 portant statut particulier du corps des aides-soignants et des agents des services hospitaliers qualifiés de la fonction publique hospitalière, le recrutement de l'ensemble du corps médical a été complété par un certificat de spécialité.
Le concours, un mode de recrutement contraignant
Les personnels souhaitant exercer dans les établissements relevant de la fonction publique territoriale doivent passer un concours spécifique alors que les missions et soins réalisés sont identiques au secteur privé. Dans le contexte actuel de manque de personnel soignant qualifié, en particulier infirmier, le recours obligatoire à un concours spécifique s’avère contraignant pour ces établissements.
Une crise de recrutement conduit ainsi les directeurs d'établissement, contraints par l'urgence, à faire appel à l'intérim ou à des contrats à durée déterminée renouvelables mais limités dans le temps pour assurer la qualité des soins aux personnes, une situation qui génère des coûts supplémentaires pour les résidents ainsi que pour les budgets publics. Un assouplissement des modalités de recrutements de ces personnels soignants a pu être suggéré.
Dans sa réponse à une parlementaire la ministre rappelle que l'article 36 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale fait du concours la voie d'accès de droit commun aux emplois de la fonction publique territoriale. Cette règle générale, qui vise à garantir l'égalité d'accès de tous les candidats aux emplois publics, nécessite l'organisation d'épreuves afin d'opérer une sélection entre candidats possédant les mêmes titres ou diplômes.
Les difficultés rencontrées par les collectivités territoriales pour recruter des personnels titulaires des établissements hébergeant des personnes âgées dépendantes (EHPAD) ainsi que les différences qui peuvent exister, s'agissant des modalités d'accès selon la nature des établissements (privés/publics), ont conduit à procéder à un allègement des épreuves notamment pour l'accès au cadre d'emplois des auxiliaires de soins territoriaux et des infirmiers territoriaux en soins généraux.
Ainsi, depuis 2009, le décret n° 93-398 du 18 mars 1993 relatif aux conditions d'accès et aux modalités d'organisation des concours sur titres pour le recrutement des auxiliaires de soins territoriaux prévoit une seule épreuve pour les candidats au cadre d'emplois. Le concours comporte un entretien d'une durée de quinze minutes permettant d'apprécier les capacités professionnelles du candidat, ses motivations et son aptitude à exercer les missions incombant aux membres du cadre d'emplois.
De même, pour les infirmiers territoriaux en soins généraux, l'article 1er du décret n° 2012-1415 du 18 décembre 2012 fixant les modalités d'organisation du concours pour le recrutement des infirmiers territoriaux en soins généraux dispose que le concours consiste en une épreuve unique d'entretien, à partir d'un exposé du candidat sur sa formation et son projet professionnel.
Par ailleurs, la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires a modifié l'article 36 de la loi n° 84-53 précitée. La procédure de recrutement pour les filières sociale, médico-sociale et médico-technique a été simplifiée en précisant que ces concours et examens professionnels pouvaient notamment consister en une sélection opérée par le jury au vu soit des titres, soit des titres et travaux des candidats.
Cette sélection doit être complétée par un entretien oral avec le jury et, le cas échéant, par des épreuves complémentaires.
Identifier les pistes de modernisation
La suppression des concours sur titres sans dispositif alternatif destiné à garantir l'égal accès aux emplois publics n'est pas envisageable au regard des exigences constitutionnelles.
Néanmoins, les réflexions engagées par le Gouvernement, dans le cadre du chantier de modernisation des ressources humaines de la Conférence nationale des territoires et du programme « Action publique 2022 », visent à identifier les pistes de modernisation et d'assouplissement en matière de recrutement et de gestion des ressources humaines.
L'assouplissement des modalités de recours au contrat font pleinement partie des thématiques de travail en cours.
Au JO AN du 30 octobre 2018, page 9757.